SOLID'Art 2021

"Pour ce qui est du vent dans les voiles, il nous rappelle que le désir de l’homme est excentrique, que c’est au lieu de l’Autre qu’il se forme : juste dans ce cabinet particulier où de la coquille où gîte l’huître s’évoque l’oreille de la jolie femme avec un goût de compliment." Lacan

Oct 6, 2020

Trobar: c'est quand je vois verdoyer...

 

                                 Jardin de Luxembourg, mars 2020

Trobar

: vert un peu rouillé, sinon derrière les branches, brindilles, vert sapin, entrelacs des feuilles jaunies, ombrées, pulsées par les superpositions des verts, et des bruns ; une forme coupe sur l'autre, alors que le sol donne la perceptive, plan et profondeur d'emblée ; l'intervalle éclot parce que je suis là, comme forme d'une forme, tableau et profondeurs de champ. Transition. Je me sens plus au sud. Comme vivre. Et c'est un temps qui n'est pas dans le temps, je ne sais plus si je pense, désire ou si je me souviens. Vert, verdoyer, c'est quand je vois verdoyer... Ça s’interrompt pare ce que je prends conscience que je trouve ça beau : vert nappé, vert étale du sol, des chaises dans la rangée, cette allée qui se perd dans les feuillages. De tout cela, se dégage une attente, une compréhension suspendue ou différée, je me sais vulnérable, j'attends que ça passe, parce que ça va passer. Le bus descend lentement. Une fois sur deux le bus qui va à Bygdoy fait ce détour ; il descend en longeant la petite baie, pour s'arrêter au Musée Kon-Tiki. Je ne sais plus où j'en suis, la lumière m'apaise ; ce paisible trajet y est pour beaucoup. La neige à fondu, les pluies ont cessé. Je ne pense à rien, vert et terre, bleu et lumières. Vie nue. Un fait n'est pas un fait tant qu'il ne vient pas avec ce qu'il n'a pas été ; de même que nous sommes fait aussi de ce qui n'a pas eut lieu, ou n'a pas été ; dans un sens, parce que nous ne sommes pas, dans un autre parce que nous pouvons nous donner une forme. Ce vert n'est déjà plus qu'il fait retour, et courbe l'espace ; vert vent, branches vertes, le bateau sur la mer et le cheval dans la montagne. C'est ce que j'entends d'une voix andalouse. Cadix et Bygdoy, ils se partagent le même pli. Le bus s'arrête çà et là, c'est une heure calme, en été à cette heure-ci le bus serait plein. Je ne sais pas penser, je ne pourrai pas penser, d'ailleurs, je ne saurai dire ce que j'entends ni ce que je pense. C'est là, lors de ces trajets que j'ai appris que ma pensée est espace ; paysage, heure dissoute, trajets. Je me laissais conduire par la préséance des choses vue. Comme enfant, peut-être un peu perdu, je regarde les choses du commun. Rien, c'est sans doute ce rien, un pli parmi les choses, un sens du penser sans pensée et vert rouillé, vert foncé, vert vent, branches vertes, le bateau sur la mer et le cheval dans la montagne. J'ai vu comme peu à peu ces trajets à Bygdøy se peuplaient d'empâtement, des touches peintes, je savais qu'il y avait du Rubens, les heures du Louvre, la salle de Médicis, dans ce paysage. Paysage de paysage, paysage hors paysage, en réalité couleurs passant d'un milieu à un autre. La douleur de penser se fait rattraper par la porosité du coloris, vert vent, vers branches, vert flamand, vénitien, hollandais. Je quittais peu à peu la faction du muet. La destruction n'y était plus, un regain d'espace me donnait un là de présence, là ici, res. Sinon que par touches :  vert vent, branches vertes, le bateau sur la mer et le cheval dans la montagne.

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